HIPPISME : ERIC SAINT MARTIN, L’EX JOCKEY EST À PRÉSENT PATRON DE RESTAURANT
« Après avoir exercé durant trente ans le métier de jockey au plus haut niveau, le fils du légendaire Yves Saint-Martin vient de reprendre la suite du bistrot gastronomique, le Lily de Neuilly.
Eric Sain-Martin (à gauche) a tout récemment succédé à Philippe Cabale à la direction du Lily de Neuilly.
Eric Saint-Martin (à gauche) a tout récemment succédé à Philippe Cabale à la direction du Lily de Neuilly
Article Le Parisien
Il est 16h00, les chaises ont été remontées sur les tables. La salle du restaurant Le Lily de Neuilly (Hauts-de-Seine) est plongé dans l’obscurité, laissant à peine entrevoir une fresque des années 1930 illustrant Lily, la première propriétaire du lieu.
Dans moins de deux heures, l’effervescence va reprendre avant l’arrivée des clients pour le service du soir. Assis au bar, téléphone à la main, Eric Saint-Martin profite de l’accalmie pour éplucher son courrier et régler les ultimes détails administratifs de sa récente acquisition. Depuis quinze jours, il est le nouveau patron de l’établissement du 59, rue Chauveau à Neuilly, en association avec le chef cuisinier, William Jourdain.
Un comble pour cet ancien jockey, qui s’est privé pendant trente ans de carrière pour conserver un poids de 52 kg, de se retrouver à la tête d’un bistrot gastronomique à servir des plats raffinés, dont Claude Chabrol et Michel Serrault firent leur refuge. « Depuis juin 2009, date à laquelle j’ai raccroché les bottes, j’ai pris 8 kg et une pointure de chaussure », confie celui qui veille toujours à sa silhouette avant de confier que son « rêve était de devenir acteur de cinéma. »
EN 1993, IL TRIOMPHE DANS LE PRIX DE L’ARC DE TRIOMPHE
À 54 ans, le fils du légendaire Yves Saint-Martin a conservé de son ancien métier de sportif, l’énergie et l’enthousiasme. Surtout, lorsqu’il se met à retracer, dans l’atmosphère agréablement feutrée de son restaurant, sa carrière passée. Un destin jamais très éloigné de l’univers du show-biz.
Porté le glorieux héritage d’un paternel extrêmement populaire s’est révélé être un handicap plus qu’un atout. « Être le fils de… m’a totalement desservi », avoue-t-il. L’éloignement a été sa meilleure carte à jouer. Ce qui ne l’a pas empêché, en 1993, d’accrocher à son palmarès une victoire dans le Prix de l’Arc de Triomphe. Ce dimanche, en selle sur Urban Sea, il franchissait le poteau en tête à la côte astronomique de 38/1, pour un propriétaire de Hong Kong, David Tsui. Un triomphe qui aura un impact incontestable sur l’évolution de sa carrière. « Une belle revanche, après tout ce que j’ai pu entendre à mon sujet » déclare-t-il. Ce dimanche 3 octobre, Eric Saint-Martin prouvait qu’il n’était pas uniquement le fils de…, mais un jockey à part entière.
« JE VOULAIS APPRENDRE L’ANGLAIS ET …RENCONTRER BROOKE SHIELDS »
Il est soudainement sollicité et réclamé par tous ceux qui l’avaient dénigré quelques années plus tôt. Trop tard. C’est finalement vers l’Asie qu’il s’envolera. En mars 1994, il fait partie des dix rares jockeys internationaux sélectionnés par le Royal Hongkong Jockey Club pour venir monter à Sha Tin et Happy Valley, les deux prestigieux champs de courses de l’ancienne colonie britannique. Les succès ne tardent pas à arriver. À la fin de la première année, l’expatrié bat le record de victoires. Il ne quittera l’empire asiatique des courses que seize ans plus tard. Deux de ses quatre enfants y verront le jour.
Avant Hong Kong, il y a eu la Californie. L’ex-pilote a vécu cinq ans à Pasadena. À vingt ans à peine, il devient jockey tête de liste, côtoie le gratin hollywoodien et obtient le privilège de travailler six mois dans l’écurie de John Gosden. Une vie de folie. « Je voulais apprendre l’anglais et rencontrer…Brooke Shields », se remémore-t-il. Les deux objectifs ont été atteints! « Un jour, au péril de ma carrière, je me suis fait porter pâle dans six courses pour la rencontrer. Elle dédicaçait un livre au Beverly Hills Hôtel à Los Angeles. J’ai fait une photo avec elle. Vingt ans plus tard je l’ai recroisée à New York. Elle se souvenait du cliché pris ensemble », raconte-il les yeux encore papillonnants.
« J’AI MONTÉ ET GAGNÉ POUR ROBERT WAGNER »
Le monde du cinéma a finalement souvent flirté avec son tracé professionnel. « J’ai monté et gagné pour Robert Wagner (Pour l’Amour du Risque), Joe Pesci (L’Arme Fatale) et Merv Griffin (créateur américain de la Roue de la Fortune) ». Dans la quiétude du Lily de Neuilly, soudain, les souvenirs s’emballent, « j’ai serré la main d’Al Pacino, bu un thé avec Lætitia Casta », déballe dans un flot incessant l’admirateur inconditionnel de l’acteur français, Alain Delon. À se demander lesquels de ses exploits ont le plus marqué Eric Saint-Martin, les actrices ou les courses ?
« J’ai toujours su garder les pieds sur terre », avoue-t-il. Élevé dans la rigueur et le goût de l’effort, il n’était pas question de se perdre en chemin. Les rappels à l’ordre du paternel étaient fréquents. « Un jour, à mes débuts, je rentre fièrement à la maison, heureux d’annoncer à mon père que je venais de remporter trois courses. « Un spectacle effroyable« , m’a-t-il répondu ! Ma façon de monter lui avait totalement déplu. »
Le monde des paillettes n’aura pas réussi à détourner Eric Saint-Martin de sa trajectoire initiale et familiale : l’univers hippique. Et le voilà désormais aux fourneaux. Un nouveau challenge pour d’autres rencontres. »